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Comité d’investissement de mai 2015

« L’Europe est la zone d’investissement de ce début d’année »

Le paradoxe actuel des marchés obligataires semble s’établir durablement. Ainsi, au 16 avril 2015, l’actif sans risque en France, les bons du trésor, affichent une rémunération négative de -0,19% pour les horizons inferieurs à 6 mois, alors même que l’inflation s’établît a environ 0,5% en mars. Les taux réels courts affichent donc actuellement des niveaux d’environ -0.7%, car les investisseurs préfèrent payer pour avoir leurs liquidités investies dans ces actifs sûrs. Leurs montants sont en effet trop importants pour être conservés sous forme numéraire. Il est à noter que le livret A représente une anomalie de marché, puisque sa rémunération a été maintenue à 1% au 15 janvier dernier par le gouvernement en dépit de la recommandation du gouverneur de la banque de France(1) de baisser ce taux. Cette anomalie, motivée par des raisons politiques, ne pourra cependant qu’être temporaire car elle est très coûteuse pour les opérateurs HLM, qui sont les bénéficiaires des fonds du livret A. Le livret A étant plafonné, les épargnants français à court terme sont largement en manque d’opportunité de placement. C’est pour cela que ce compartiment doit être minimisé, pour ne refléter que les réels besoins de liquidités de nos clients à court terme, considérés comme le matelas nécessaire de dépenses à horizon un an.

Puisque le monde obligataire ne rémunère plus le risque, il semble naturel de se tourner vers les marchés « actions » pour améliorer les rendements d’investissements. Ainsi, le début d’année a été marqué par un fort dynamisme et une multitude de records sur l’ensemble des continents. En Europe, la BCE soutient cette tendance par ses injections de liquidité. Cet excès de liquidités déversé sur les marchés financiers n’a d’autre alternative que de s’orienter vers le marché actions afin d’y trouver des rendements. La performance des marchés actions actuels, malgré la récente consolidation, soulève cependant la question de savoir si elle correspond à des fondamentaux économiques, ou à un pur effet technique découlant de l’action de la BCE.

Quelle est la situation macroéconomique mondiale ? L’élément moteur de l’économie mondiale pour 2015 sera certainement la baisse du baril de pétrole, qui historiquement a toujours eu un impact positif sur la croissance. L’effet n’a pas encore été marqué au premier trimestre aux USA en raison d’un hiver particulièrement rigoureux, mais il devrait se manifester au second trimestre. La FED n’a pas encore prévu de remonter ses taux directeurs en raison de la fragilité de la reprise, les entreprises américaines étant notamment pénalisées par la force du dollar. Ainsi quelques déceptions sur les résultats de grandes entreprises ont causé une baisse récente des marchés. D’une manière générale, le bilan des ménages américains s’est amélioré avec un niveau de richesse moyen atteignant son plus haut niveau historique, ainsi qu’un désendettement significatif depuis la crise. La locomotive de la demande américaine devrait donc redémarrer, ce qui sera également bénéfique pour l’Asie qui exporte massivement vers les Etats-Unis. La corrélation des ventes au détail avec le prix du baril de pétrole (avec un délai de 10 mois) permet d’anticiper une croissance de la consommation US dans les mois qui viennent, et par conséquent un rebond de la production asiatique.

De son côté, la Chine est en cours de mutation industrielle engendrant un atterrissage en douceur de son économie, et non un arrêt brutal. Ainsi, la croissance a atteint au premier trimestre son plus faible niveau depuis quelques années (7%) mais l'internationalisation de ses marchés financiers et de sa monnaie est en marche. Son marché immobilier semble également en voie d’assainissement.

En Europe, le diptyque (pétrole et taux d’intérêt) est très favorable à la consommation. Globalement, les pays Européens ont entamé des réformes structurelles comme le montre le bon taux de réponse aux recommandations de l’OCDE. Toutefois, le QE (Quantitative Easing)(2) a conduit à une pause des réformes en assurant le financement des déficits publics. Il s’agit d’une bonne nouvelle à court terme, mais qui l’est beaucoup moins à moyen terme. Cette politique a également évité le scénario noir de la déflation, qui joua un rôle important dans la « décennie perdue du Japon ». De plus, contrairement au Japon, l’Europe a une évolution du prix de l’immobilier plus graduelle, des bilans bancaires améliorés et une politique monétaire expansive entraînant un impact positif sur la devise.

Toutefois, la question de la possible survalorisation des marchés actions demeure. Avec un multiple cours – bénéfices en Europe de 17, le niveau de valorisation actuel apparaît nettement inférieur à celui de 2000 où il culminait à 25. Ce ratio devrait également diminuer avec une hausse des résultats à venir par le simple effet pétrole, devise et taux d’intérêt. D’après le PE de Shiller(3), les actions européennes deviennent plus intéressantes que les actions américaines. En Chine, il approche les 11. 

Dans ce contexte, le marché actions semble être effectivement la principale alternative permettant de dégager du rendement, et ce dans une situation macroéconomique en cours d’amélioration. 

 

(1) Christian Noyer

(2) Assouplissement quantitatif désignant un type de politique monétaire dit «  non conventionnel »

(3) Comparaison entre les prix des actions par rapport à la moyenne des profits des dernières années (5 ans)